Le football et le golf touchent donc des parties de la population relativement différentes. De ce fait, il est intéressant de comprendre comment les inégalités sont perçues dans chacun des deux sports. Pour cela, il faut définir plusieurs types d’inégalités. Attaquons donc la deuxième partie de notre enquête sur les rapports étroits entre ces deux sports !

Y-a-t-il des inégalités ?

Avant de parler de la perception des inégalités, il semble évident qu’il convient de définir lesdites inégalités.

Inégalités physiques

Une diversité de physiques

La première est l’inégalité physique : le sport a en effet ceci de particulier qu’il s’appuie très fortement sur les qualités physiques des individus. Dès lors, il est bien évident qu’une certaine discrimination s’exerce : du fait de la diversité des physiques des sportifs, des qualités différentes seront présentes, et certains physiques s’adaptent mieux à la pratique d’un sport ou d’un autre.

Mais le football a ceci de particulier qu’il autorise toute une diversité de physique. Une analyse des tailles et des poids des joueurs de football permet de confirmer cela : le gabarit des joueurs de football professionnel est très divers. Ci-dessous, un rapport poids-taille des joueurs des cinq grands championnats européens.

Rapport taille-poids des joueurs par poste
Rapport taille-poids des joueurs par poste

Rares sont les gabarits qui ne sont pas « admis » dans le monde du football professionnel : entre le quintuple ballon d’or argentin Lionel Messi (169 cm, 67 kg) et le gardien champion du monde 2014 avec l’Allemagne Manuel Neuer (193 cm, 90 kg), il y a un gabarit d’écart, mais les deux font partie des meilleurs joueurs à leur poste. Aucun physique – à partir du moment où il est adapté à la pratique du sport de haut niveau – n’empêche la pratique du football au niveau professionnel, et la laxité est encore plus grande en ce qui concerne le sport amateur.

Des préjugés ethniques ?

Pourtant, des stéréotypes sont bien présents dans le monde du football. C’est ce dont témoigne notre sujet C. C, la cinquantaine finissante et les cheveux grisonnants, connaît bien le football de haut niveau. Actuellement agent de joueurs, il est passé par un centre de formation professionnel et plusieurs membres de sa famille sont devenus footballeurs professionnels.

« Quand j’étais jeune, en tout cas, c’est sûr qu’on allait plus facilement rechercher la facilité technique chez un maghrébin, la puissance physique chez un black et l’intelligence de jeu chez un blanc. Attention, je te ne dis pas que les clubs sont racistes, je dis juste que c’est naturel. Parce que depuis soixante-dix ans, c’est comme ça. Les gens sont formatés, ils ont l’habitude. C’est normal. Parce que tu regardes la Ligue 1, et que tu reproduis ce qui existe déjà… Quand on voit ce que Willy [Sagnol, ancien international français et entraîneur notamment de Bordeaux(1)] avait dit il y a quelques années… Je ne pense pas qu’il soit raciste, je pense que c’est naturel. Mais regardez des équipes de milieu de tableau de Ligue 1… Bon, tu comprends ce que je veux dire. »

Pour C., il existe donc une espèce de catégorisation des joueurs qui s’opère dans le football professionnel, en fonction des origines ethniques. Cela rejoint également la déclaration de Willy Sagnol en question, qui insistait sur les qualités des joueurs en fonction de leurs origines. Une catégorisation également reprise par Laurent Blanc lorsqu’il était sélectionneur de l’équipe de France dans l’affaire désormais tristement célèbre des « quotas ». Au cours d’une réunion avec le Directeur Technique National François Blaquart, Laurent Blanc avait tenu des propos polémiques sur les profils des joueurs dans les centres de formation :

« Qu’est-ce qu’il y a actuellement comme grands, costauds, puissants ? Les blacks […] Je crois qu’il faut recentrer, surtout pour des garçons de 13-14 ans, 12-13 ans, avoir d’autres critères, modifiés avec notre propre culture […] Les Espagnols, ils m’ont dit : Nous, on n’a pas de problème. Nous, des blacks, on n’en a pas » (Arfi, et al., 2011).

Des critères variables

Les différences de morphologie sont donc bien prises en comptes dans le football, et se conjuguent quasiment systématiquement avec des facteurs ethniques, rendant le problème un peu plus complexe. Car si les différences physiques sont propres à chaque individu, les différences ethniques tiennent davantage du volet social.

Avant d’analyser cela plus en profondeur, penchons-nous sur le cas du golf. Mais préalablement à une analyse plus en profondeur, il semble nécessaire de poser un jalon : si des clubs existent aussi bien dans les deux disciplines, football et golf, il ne faut pas oublier que, dans le premier cas, le club est organisé autour d’une équipe qui doit avoir le meilleur résultat possible ; et dans le deuxième exemple, le club n’est qu’une réunion de personne ayant des intérêts communs pour un même sport.

Ainsi, une différenciation s’opère dans la manière dont sont effectuées les sélections. Au golf, il n’y a pas de sélection dans un contexte collectif mais uniquement une progression autour de critères individuels – handicap notamment. On observe en outre un morphotype qui se rapproche du morphotype moyen de la population du pays. Ainsi, les meilleurs joueurs français du circuit font entre 175 cm et 187 cm, des tailles qui peuvent assez aisément « encadrer » la taille des populations entre 20 et 40 ans en France (Saint-Pol, 2006) (Saint-Pol, 2007) (INSEE, 2019) (L’Equipe, 2019).

Note  :

(1) Alors à la tête des Girondins de Bordeaux, en novembre 2014, Willy Sagnol avait déclaré : « L’avantage du joueur, je dirais typique africain : il n’est pas cher, généralement prêt au combat, on peut le qualifier de puissant sur un terrain. Mais le foot, ce n’est pas que ça, c’est aussi de la technique, de l’intelligence, de la discipline. Il faut de tout. Il faut des Nordiques aussi. C’est bien les Nordiques, ils ont une bonne mentalité. Une équipe de foot, c’est un mélange. C’est comme la vie, c’est comme la France. Sur un terrain, on a des défenseurs, des attaquants, des milieux, des grands, des rapides, des petits, des techniques. Voilà. » (Dhers, 2014).

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