Le football africain possède un charme bien à lui. Même si les règles du jeu sont les mêmes qu’en Europe, les manières d’y jouer, les moyens et le matériel en font un spécimen de football bien à part. Mais ce qui contraste le plus entre le football africain et le football européen, c’est sans doute la culture autour du sport. Pour ce deuxième épisode de la quatrième saison de Tour du Monde, direction le Zimbabwe et le Chicken Inn F.C..

Dans l’antre du Zambèze

Le Zimbabwe est de ces pays d’Afrique où l’on connaît peu d’autres choses que le nom. Entouré par l’Afrique du Sud, le Botswana, le Mozambique et la Zambie, enclavé par les fleuves Zambèze et Limpopo, le Zimbabwe est pourtant une des puissances historiques de l’Afrique. Depuis le onzième siècle, le territoire du Zimbabwe est le siège de royaumes puissants. Les Shona d’abord, du onzième au quinzième siècles, puis les Torwa jusqu’au dix-septième, où la colonisation portugaise et les bouleversements sociaux vont entraîner la prise de pouvoir des Changamire. Au dix-neuvième, une dictature militaire zouloue prend le pouvoir au Zimbabwe, et obtient notamment la reconnaissance du pays par l’Afrique du Sud. Mais tout va s’accélérer à la fin de ce même siècle, lorsque les anglais se mêleront de l’affaire. Livingstone rejoint les Chutes Victoria, puis quelques années après Cecil Rhodes obtient concession du pays.

Le territoire du Zimbabwe est alors divisé entre Rhodésie du Nord et Rhodésie du Sud. Dans ces deux zones se trouvent également la future Zambie et le Nyassaland, qui portera plus tard le nom de Malawi. Après de longues tractations – indépendance auto-proclamée, rattachement temporaire au Royaume-Uni -, le Zimbabwe devient officiellement indépendant en 1980. Arrive alors à la tête du pays un certain Robert Mugabe, ancien chef de guérilla. Il dirigera le Zimbabwe, d’abord en tant que premier ministre puis comme président, de 1980 à 2017. A la fin de son mandat, son bilan est critiqué de toute part : l’inflation est digne de l’Allemagne des années 30 – Mugabe fait d’ailleurs l’éloge d’Adolf Hitler en 2003 -, le chômage atteint les 90 % et les droits de l’Homme comme la liberté d’expression sont plus des concepts que des réalisations concrètes dans le pays.

La faim

La politique agraire désastreuse de Mugabe – expulsion des fermiers blancs, appauvrissement du pays, passage de situation d’exportateur à importateur – conduit à des grandes vagues de régressions sociales. Et outre le taux d’analphabétisation qui atteint des sommets, le taux de malnutrition explose lui aussi. Cette malnutrition est majoritairement due qu’à des problèmes d’accès à des sources de nourriture. Parmi les solutions les plus concrètes à ce problème, la restauration rapide connaît dans les années 1990 un véritable essor dans le pays. Un des acteurs majeurs de ce marché est Chicken Inn. Fondée à Harare en 1987, Chicken Inn est une des premières entreprises agroalimentaires du pays à sourcer localement tous les ingrédients. Trente ans après sa création, Chicken Inn est devenu le premier acteur de la restauration rapide du pays.

Le succès de Chicken Inn s’est principalement fondé sur un excellent rapport quantité-prix, qui séduit aussi bien les familles que les jeunes. Chicken Inn est également une des premières marques à mettre en place en Afrique un système de drive, permettant de délivrer rapidement des grosses quantités de poulets frits. Dans la foulée du succès de l’enseigne de poulets, le groupe Simbisa – groupe fondé par Chicken Inn – a lancé différent services pour séduire toutes les branches de la population.

Ainsi, les amateurs zimbabwéens de pizza peuvent se diriger vers Pizza Inn, tandis que la crème glacée sera servie chez Creamy Inn, la boulangerie au sein de Baker’s Inn, le poisson chez Fish Inn. Mais ce n’est pas tout : Simbasa possède également des services de restauration assise, comme Nando’s, Rocomamas ou encore Ocean Basket. Le groupe Simbasa possède plus de quinze marques, implantées dans toute l’Afrique. Simbasa est désormais le numéro un de l’alimentation au Zimbabwe.

Le plaisir du jeu

Dans la galaxie Simbasa, un objet non-identifié a vu le jour en 1997. Cet objet, c’est le Chicken Inn Football Club. Avec son nom qui ne laisse que peu de doute quand à ses origines, il commence dans les divisions inférieures du Zimbabwe, où il végète pendant plusieurs années. Le début des années 2000 permet néanmoins au club de gravir les premiers échelons, et en 2011, après une saison magnifiquement réussie en deuxième division, le Chicken Inn Football Club accède à la gloire nationale. Cette montée enlumine de joie Bulawayo, la deuxième plus grande ville du pays, siège des Gamecocks, le surnom amusant des joueurs du CIFC.

Bulawayo ne manquait pourtant pas de grandes équipes de football, avec notamment les deux géants nationaux, les Highlanders et les Zimbabwe Saints. Mais l’arrivée d’un nouveau venu provoque toujours une espèce de remous, et un effet d’attraction proprement humain. Et ce tourbillon va prendre la figure d’un homme, Joey Antipas. Arrivée au club en tant qu’entraîneur en 2013, Antipas va révolutionner les structures internes du club. En 2015, il amène le club à la gloire nationale, avec une victoire en championnat et une série de vingt-cinq victoires en trente matchs. Antipas, au cours de ses deux passages au Chicken Inn, est adulé comme un héros national.

Et si le Chicken Inn Football Club est depuis rentré dans le rang du football zimbabwéen, la chaîne de restauration rapide du même nom, elle, fonctionne à plein régime. Forte de l’association à la santé et au football, le fast-food s’est offert une nouvelle image. Le football fait décidément bien les choses…

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