2008. Le cheikh Mansour ben Zayed Al Nahyan commence les négociations pour racheter Manchester City. Le foot anglais est sur le point d’avoir un nouveau géant. Mais le foot mondial ne se doute pas que ce rachat va bouleverser tout son équilibre. Du rachat du deuxième club de Manchester à un nouvel ordre mondial footballistique, le City Football Group pense le football à l’échelle globale.
De l’Abu Dhabi United Group…
Tout commence quand, pour faciliter le rachat de Manchester City, les dirigeants émiratis décident de créer une holding de divertissement, l’Abu Dhabi United Group. Ce groupe sert alors simplement à financer les dispendieux investissements de l’émirat chez les citizens. L’Abu Dhabi United Group n’a rien d’un grand groupe de clubs de football. Des structures similaires ou comparables existent un peu partout dans le monde, afin de réduire les risques en cas de faillite du club.
Mais le processus s’accélère en 2012. En effet, Ferran Soriano, vice-président du Barça de 2003 à 2008, est nommé directeur exécutif de Manchester City. S’en suit une lente phase d’hispanisation du club du nord de l’Angleterre, qui s’est conclue en apogée avec le recrutement de Pep Guardiola. Mais d’autres espagnols rejoignent l’encadrement du club, notamment Txiki Begiristain, l’un des « trois basques de Cruyff« . Et Ferran Sorriano voit large. Il voyage dans le monde entier, et notamment aux États-Unis, où il fait la connaissance de Don Garber.
Don Garber n’est autre que le commissionner de la Major League Soccer, autrement dit le grand patron du football nord-américain. Et si Garber souhaite développer le football aux États-Unis – et, dans une moindre mesure, au Canada -, il souhaite le faire avec des partenaires étrangers. Dans les années 2005, il entame des discussions avec Ferran Sorriano dans l’optique de créer une franchise du FC Barcelone outre-Atlantique. Cela ne se fera pas. Mais Sorriano garde cela bien en tête. Et quand il arrive à la tête de Manchester City, il relance le projet et en parle aux dirigeants émiratis.
… à un groupe planétaire…
Tout se concrétise très vite. En décembre 2012, le projet de Manchester City fuite dans la presse. Malgré les dénégations véhémentes des SkyBlues, le projet voit bel et bien le jour au mois de mars 2013. Don Garber officialise l’arrivée d’une nouvelle équipe, qui prend le 7 mai 2013 le nom de « New York City FC ». Complètement filiale de Manchester City, elle sert d’escale américaine pour une partie du staff du club – Patrick Vieira le premier – et aussi pour de nombreux joueurs. Créé de zéro, le NYC FC commence à jouer dans le championnat américain lors de la saison 2015. Emmené par des joueurs comme David Villa – meilleur buteur et joueur le plus capé de l’histoire du club -, le club du Bronx se fait petit à petit une place dans la conférence est de la MLS.
Mais entre l’annonce de la création du New York City FC et le premier match de celui-ci, Manchester City, par le biais du City Football Group, frappe un nouveau grand coup. En effet, à la fin du mois de janvier 2014, le City Football Group officialise son acquisition du Melbourne Hearts, alors en première division australienne. Et plutôt que de continuer à faire subsister le club sous son identité originelle, le City Football Group opère un relooking complet des Hearts. En quelques semaines, le club abandonne ses couleurs traditionnelles rouges et blanches et son logo, pour prendre un écusson fortement inspiré de celui de Manchester City. Le maillot domicile devient bleu ciel et blanc, et un certain David Villa vient faire un tour en Australie en attendant que son club new-yorkais joue ses premiers matchs.
Mais cela ne s’arrête pas là. La même année, au mois de mai, le City Football Group prend une participation significative au sein des Yokohama F. Marinos. Sans contrôler le club, le City Football Group se place ainsi sur le marché japonais.
… qui phagocyte le football mondial
Après quelques années d’accalmie, le City Football Group recommence son expansion au mois d’août 2017, en investissant en Espagne. Le Gérone FC, promu en première division espagnole, devient la propriété du groupe à 45 %. Les autres 55 % ? 45 % dans la poche de Pere Guardiola, le frère de Pep Guardiola, qui se trouve être l’entraîneur de Manchester City. Et le reste dans les mains de petits investisseurs. La même année, le City Football Group prend des participations en Uruguay, au sein du Club Atlético Torque. En parallèle, le Toulouse Football Club, en France, se rapproche très fortement du consortium. Même si cela n’est pas tout à fait officielle, le TFC change ainsi d’identité graphique pour avoir un logo ressemblant à un de ceux du groupe.
Le dernier né dans la famille est en Chine. En troisième division chinoise, le projet global du City Football Group vient de trouver une nouvelle victime. Le Sichuan Jiuniu FC, basé dans la cinquième ville du pays, vient d’être racheté par le City Football Group. En objectif, faire gravir les échelons au club, et l’installer en première division en quelques saisons seulement. Le City Football Group sera ainsi ouvert sur les États-Unis, l’Amérique du Sud, l’Europe, la Chine et le Japon. De quoi devenir plus qu’un simple club de football, mais aussi une machine à faire tourner le football mondial.
Le problème principal de cet investissement réside dans le déséquilibre que cela induit dans le football mondial. A l’image du groupe Red Bull, le City Football Group fausse marché des transferts, championnats et salaires en créant des accords inégaux. Un peu à la manière des trusts du début du vingtième siècle dans les entreprises nord-américaines, le football mondial est phagocyté par plusieurs consortiums du même genre.