« La quintessence du plaisir ne peut être donnée que par des personnes du même sexe« , disait en 1893 Oscar Wilde dans une citation depuis galvaudée par les luttes identitaires. Car la quintessence du plaisir, pour reprendre l’expression de l’auteur du Portrait de Dorian Gray ne réside pas forcément dans l’acte sexuel. Certes, là était sans doute son idée. Mais cela n’empêche pas de repenser la phrase dans un contexte beaucoup plus global. Car la vie – un autre nom pour le football -, c’est apporter du plaisir dans la vie des gens.

Pink Champagne on ice

« Up ahead in the distance, I saw a shimmering light ». Au loin,  une lumière chimérique. C’est un peu ça, le plaisir. Personne ne sait réellement ce qu’est le plaisir, ni quels mots peuvent le personnifier. Quel est le moment de votre vie où vous avez été le plus heureux ? La question est absolument insolvable. Votre mariage ? Et si vous avez eu des enfants, alors ? Le premier, ou le deuxième ? Et lorsque vous divorcerez ? Le bonheur, le plaisir, ces deux notions philosophiques que bien des élèves de Terminale ont dû intérioriser, ces deux notions se confondent au point de ne faire plus qu’une. Le point central s’appelle le football. C’est là que commence le récit, c’est là aussi qu’il s’arrête.

Le football, en cela, ressemble un peu au Champagne rosé servi frais dans des coupes de cristal. Une espèce de lueur au milieu d’un océan de banalité. Rien n’est jamais pareil, quand on goûte pour la première fois un Champagne rosé. On voit les choses différemment, et à chaque Champagne blanc goûté, on attend avec impatience le prochain Champagne rosé. C’est un peu ça, le football. On regarde les matchs, les uns après les autres, et on attend avec impatience la prochaine rencontre de son équipe. Une histoire d’amour qui se prolonge par intermittence et qui devient notre seule et unique raison de vivre.

Océan

Si la vie était un océan, le football serait ce petit archipel aux îles éloignées, aux îles éparses. Le bateau sur lequel nous voguons nous emmène d’un bout à l’autre de cet océan, de la naissance jusqu’à notre mort, sans prendre d’autres pauses que ces instants de bonheur pur, absolu et immédiat. Il ne faut pas réfléchir lorsque l’on parle de football. Il faut penser, et ce n’est pas du tout la même chose. C’est une chose entièrement différente, parce que cela ne donne pas, au final, le même résultat. Dans un cas, c’est le cerveau qui parle, et lui uniquement. Dans l’autre cas, il y a aussi le cœur. Ce petit organe, qui, paraît-il, est vital, et sans lequel personne ne pourrait vivre. Et que pourtant chacun, à chaque action, croit se voir arraché, croit perdre à tout jamais dans les entrailles du monde.

Le football ressemble un peu à une naissance au monde. A une prise de plaisir intense, qui arrive de façon quasi-irréelle au milieu de nos vies. Personne n’a rien demandé, et soudain la météorite vient frapper avec une violence rarement vue notre corps dénudé, vautré sur un canapé taché. Derrière, il y a des hommes de l’ombre, mais qui s’en soucie réellement ? Le football n’a qu’une seule et unique attribution : apporter du plaisir dans la vie des gens. Financier, érotique, physique, intellectuel ou mental. Du plaisir, dans son acception la plus pure et la plus simple, la plus classique et la moins originale.

Et c’est pareil, où que l’on soit sur le globe. Le plaisir vient du football. Il se trouve en son sein, en son origine. Si Gustave Courbet devait repeindre son trop célèbre tableau, il choisirait peut-être un ballon. Pour choquer, en peignant le football.

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« Quand un vrai génie apparaît en ce bas monde, on le peut reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui ». (Jonathan Swift, 1667-1745)