La Coupe du Monde 1930 est la première de l’histoire. Au cours de cet été, en Uruguay, treize équipes concourent pour le premier titre de champion du monde. Dans le groupe 4, les États-Unis sont accompagnés du Paraguay et de la Belgique. Dans l’effectif de la Team USA, on trouve un certain Barth McGhee. Portrait de ce natif de Glasgow.

Le père et le fils

Quand Barth McGhee, de son vrai nom Bartholomew McGhee, voit le jour à Glasgow le 30 avril 1899, le football est déjà bien présent dans sa famille. Après tout, si l’Angleterre joue ses premiers matchs internationaux en 1872, il n’est rien d’étonnant à voir des écossais faire de même. Son père, James McGhee, est un ancien joueur des Hibernians et du Celtic. Il connaît même une sélection en 1886 contre le Pays de Galle avec l’Écosse. Alors que Barth a huit ans, son père prend la tête des Hearts of Midlothian. Mais leur vie va changer du tout au tout quand James se brouille avec un des joueurs clés du club, Bobby Walker. James McGhee est obligé de quitter son poste, et décide de tenter l’aventure outre-Atlantique. En 1910, le père émigre, en laissant ses enfants au pays.

Il ne reste cependant seul que quelques années. En 1912, ayant amassé assez d’argent, il fait émigrer sa femme Elen et ses fils Barth et Jimmy. La famille s’installe à Philadelphie, et si le père ne travaille plus dans le football, Jimmy et Barth jouent informellement avec les gamins du quartier. Bart, à dix neuf ans, s’engage pour les New York Shipbuilding, à Camden, dans le New Jersey. Dans ce club amateur, il dispute la South Jersey League. Ses bonnes performances lui permettent de signer l’année suivante dans un club membre de l’AAFA – l’American Allied Football Association -, le Wolfenden Shore. Il n’y reste qu’une petite année, puisqu’en 1921, après un essai au Bethleem Steel, il rejoint les Hibernians de Philadelphie.

Le professionnel

En 1922, Barth McGhee s’engage avec le New York Field Club, qui évolue lui dans l’American Soccer League. Son statut s’améliore un peu, puisque ses émoluments au NYFC sont ceux d’un joueur semi-amateur. Ses performances au poste d’ailier gauche lui permettent de gagner très rapidement sa place dans le onze titulaire. Barth McGhee joue quarante-huits matchs en deux saisons, et inscrit la bagatelle de vingt-trois buts. Il est un des joueurs clés du dispositif ultra-offensif mis en place par la formation. Voulant en faire son gagne-pain, il part à Fleisher Yarn en 1924, club fraîchement professionnel.

L’adaptation n’est pas compliquée pour Barth McGhee. Il marque dix buts en un peu plus de trente apparitions au cours du premier exercice qu’il dispute sous le maillot du Fleisher Yarn. Mais la sécurité financière du club n’est pas assurée. En effet, le Yarn fait faillite au bout d’une seule petite saison dans un statut complètement professionnel. Laissé seul et sans contrat, Bart McGhee parvient à trouver un nouveau club à New York, les Indiana Flooring. En 1927, ses conditions financières s’améliorent grandement, avec le rachat du club par Charles Stoneham, le patron des New York Giants en baseball. Après avoir pris le nom de New York Nationals, le club devient même New York Giants ASL en 1932.

Pas de quoi perturber Barth McGhee, qui reste l’ailier gauche numéro un du dispositif des Giants. En 1929, cependant, afin notamment de se rapprocher de sa famille, Barth se fait prêter une demi-saison au Philadelphia Field Club. Sous le maillot new-yorkais, il remporte une Lewis Cup – la coupe de l’ASL – et un championnat, plus une coupe inter-associations nationales.

Barth l’étranger, Barth l’américain

Entre temps, Bartholomew McGhee a acquis la nationalité américaine, mais les sélectionneurs le snobbent. Pas question pour autant d’aller chercher de l’autre côté de l’Atlantique. Une traversée est chère, surtout pour un simple match de football. Le problème, c’est que personne ne sait si McGhee n’a pas fait quand même une traversée de l’Atlantique, le temps d’un exil à Hull City. En effet, après 1929, à cause de la grande dépression, les statistiques de l’ASL sont tout sauf fiables. Selon le National Soccer Hall of Fame, cependant, Bart McGhee n’a jamais fréquenté la Grande-Bretagne entre son départ en 1912 d’Écosse et sa mort.

« Certaines publications rapportent que Barth McGhee a joué dans la suite de sa carrière en Angleterre, pour Hull City. Cependant, son fils Ed, vivant à Riverton, New Jersey, nous a confié, qu’à part son voyage sud-américain, Bart n’a jamais quitté les États-Unis. »

Cantonnons-nous donc aux statistiques énoncées par l’ASL : au moins deux-cent-cinquante-trois matchs et quatre-vingt-dix-sept réalisations avec le maillot des New York Giants. Vous l’aurez compris, le voyage sud-américain dont fait part Ed McGhee, c’est la Coupe du Monde 1930. Une Coupe du Monde qu’il dispute avec les États-Unis, donc. Et une Coupe du Monde qui nous permet d’avoir une des très rares photographies de Barth McGhee, celle qui illustre cet article. Une Coupe du Monde qu’il dispute sans son frère, Jimmy McGhee, celui-ci n’ayant jamais eu le niveau pour être sélectionné avec la Team USA, malgré une belle carrière à Philadelphie notamment.

Mondial

Cette Coupe du Monde est l’avènement de la carrière de Barth McGhee. Elle lui permet de recevoir ses trois seules sélections de sa carrière avec l’équipe nationale des États-Unis. Trois sélections, et deux buts. Car pour marquer un peu l’histoire de sa patte, Barth marque le premier but américain de l’histoire de la Coupe du Monde – le premier tout court ayant été l’œuvre d’un français, Lucien Laurent, lors d’un France vs. Mexique. Et, non content, de marquer l’histoire américaine, il marque aussi celle de la Coupe du Monde. En effet, contre la Belgique, il inscrit un deuxième but trois minutes plus tard. Cela devient donc le premier doublé de l’histoire des coupes du monde. Cette Coupe du Monde est celle des records pour les États-Unis, puisque c’est un de ses coéquipiers, Bert Patenaude, qui inscrit le premier triplé au terme d’une histoire rocambolesque.

La sélection nord-américaine termine troisième de cette Coupe du Monde, après une  défaite en demi-finale six buts à un contre l’Argentine de Luis Monti. Les États-Unis partagent cette troisième place avec la Yougoslavie, elle aussi défaite six buts à un, contre l’Uruguay de José Andrade. Barth aura donc joué tous les matchs des États-Unis au cours de la première Coupe du Monde de l’histoire. Après ce mondial, Barth McGhee met fin à sa carrière, le temps juste de jouer une dernière saison pour les New York Giants. Il y inscrira quand même dix-sept buts en cinquante-neuf matchs. Bartholomew McGhee s’éteindra tranquillement chez lui, à Philadelphie, le 26 janvier 1979. Sept ans plus tard, il sera admis à titre posthume au National Soccer Hall of Fame des États-Unis. Confirmant ainsi que son nom restera à la postérité.

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