L’histoire de Toninho Cerezo est une histoire brésilienne typique. Celle d’un garçon doué avec ses pieds et avec sa tête, qui porte son style de football sur les toit de l’Amérique et de l’Europe. Celle, aussi, d’un joueur hors normes qui a marqué les esprits.

Au cœur du monde

L’Europe connaît Rio de Janeiro et sait São Paulo, mais ne connaît pas grand chose de Belo Horizonte et du Minas Gerais. Pourtant, c’est dans cet État gigantesque logé entre le Distrito Federal, ses glorieux voisins et le Bahia que commence, le 21 avril 1955, l’histoire de celui qui ne s’appelle encore qu’Antônio Carlos Cerezo. Entre les grands axes routiers, le parc de Mangabeiras et les immeubles en construction, le jeune garçon apprend à jouer au football, et toque naturellement, au détour de ses dix-sept ans, à la porte de l’équipe première de l’Atlético Mineiro, un des deux grands clubs de Belo Horizonte. Au même moment, Tostão porte le Brésil sur le toit du monde lors de la Coupe de l’Indépendance et donne bien des idées au jeune Toninho Cerezo, qui rêve de porter un jour les couleurs auriverde.

Mais avant de connaître la gloire avec la sélection nationale, Toninho doit s’affirmer en club. Cela passe d’abord par un passage express, en prêt d’une saison, au Nacional de Manaus. En quelques mois, les critiques d’abord dubitatives devant ce grand garçon un peu dégingandé sont unanimes : Toninho Cerezo est le plus grand crack de l’histoire du club amazonien. Alors quand en 1974, Cerezo retourne à Belo Horizonte pour s’imposer à son poste, le Gallo lui ouvre grand son onze de départ. Telê Santana fait du bonhomme la pointe basse de son milieu de terrain, et l’histoire d’amour est bien partie pour durer.

Car trois ans suffisent à Toninho Cerezo pour devenir international brésilien, sous les ordres de l’inexpérimenté militaire Cláudio Coutinho. Il devient très vite l’un des cadres de Coutinho pour le mondial 1978. Mais ce mondial n’est pas aussi brillant que d’autres, et Cerezo n’en tire pas grande gloire. Pire, en deux ans, Cerezo se retrouve relégué sur le banc.

Le renouveau

1980 marque un tournant dans la carrière de Cerezo, avec l’arrivée de Telê Santana à la tête de la sélection. Le Brésil marche alors sur le football, avec les inévitables Zico du Flamengo et Socrates du Corinthians, mais aussi Luizinho, Reinaldo, Valdir Peres ou encore Eder. Le Brésil pratique un des plus beaux footballs de son histoire, et le milieu défensif est un des grands artisans de ce renouveau. Toninho Cerezo se surprend même à marquer lors du mondial 1982 lors du choc contre l’Allemagne. Mais il ne peut rien face à l’Italie, lors de la cruelle et diabolique défaite trois buts à deux. Peu importe, la renommé de Toninho Cerezo dépasse désormais les frontières du Brésil.

Et c’est justement en Italie que s’inscrit la suite de la carrière de Toninho Cerezo. Après près de quatre-cents matchs avec le Mineiro et une cinquantaine de buts en vrac, le Patrão da Bola devient le transfert le plus cher de l’histoire du football brésilien, en étant transféré pour près de dix millions de dollars américains à l’AS Roma. Ajusté à l’inflation, ce transfert de l’idole des supporters du Gallo vers l’Italie représente environ trente millions de dollars, une somme absolument phénoménale pour un football qui n’est pas encore celui qu’il est aujourd’hui.

Toninho Cerezo avec la Roma

Toninho Cerezo avec la Roma

 

Cerezo passe trois ans à la Roma, et marque le club en étant l’architecte de deux victoires en Coupe d’Italie en seulement trois saisons sous les couleurs de la Louve. Mais c’est à la Sampdoria que Toninho Cerezo écrit sa légende européenne. Plus bas sur le terrain, il passe six saisons merveilleuses dans une équipe qui roule sur le football : deux nouvelles coupes d’Italie, une Supercoupe d’Europe et une d’Italie, et puis un championnat national viennent étoffer son palmarès. Au passage, il échoue deux fois en finale de Coupe des Clubs Champions.

La fin des choses

Mais toutes les belles histoires ont une fin. En 1992, Toninho Cerezo sent que le plus beau de sa carrière est derrière lui. Cela fait désormais sept ans qu’il n’est plus appelé avec son pays, mais c’est pourtant vers celui-ci qu’il va se tourner. Et pas n’importe où : São Paulo. Le SPFC va devenir pendant un an et demi la nouvelle maison de Cerezo, avant que celui-ci ne décide de retourner à Belo Horizonte. Mais pas n’importe où : chez le grand rival du Mineiro, le Cruzeiro. L’année 1994 sera complexe pour Cerezo, qui sent le football abandonner son mètre quatre-vingt-trois.

Il se met alors à beaucoup bouger. Il revient à São Paulo l’espace de quelques mois, au Lousano, aux côtés de Walter Casagrande. Mais de ce club de seconde zone, les deux hommes ne retrouvent pas leur talent. Casagrande met quasiment fin à sa carrière, tandis que Cerezo repart au SPFC. Tonino Cerezo semble rouvrir les yeux à l’orée de l’année 1996. L’idole du Mineiro prend son courage à deux mains, et décide de retourner faire ses adieux à son club de toujours. Les adieux sont toujours les plus durs. Surtout pour les idoles. Surtout pour Toninho Cerezo.

Neuf matchs et deux buts suffisent à Toninho pour savoir qu’il est l’heure d’arrêter. Le 2 août 1997, le Mineiro et le Milan AC sont dos à dos après un match nul 2-2, mais l’essentiel est ailleurs. Toninho dit adieu au football. Devant trente-mille personnes, au Mineirão, Cerezo termine son dernier match par un long tour d’honneur. Sous les applaudissements.

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