Dans le football, il y a deux types de personnes. Celles qui jouent chaussettes baissées, et puis les autres. Les vrais joueurs de football, et puis les autres. Plaidoyer pour les chaussettes baissées.

Redescendre les chaussettes

Les chaussettes ne sont pas conçues pour être positionnées basses sur les jambes. Au contraire : elles sont prévues pour arriver immédiatement à mi-jambe, juste en dessous du genou. Les chaussettes sont un peu délaissées dans l’attirail du footballeur. Il est en effet beaucoup plus courant de trouver une photo de joueur coupée au buste ou au niveau des genoux qu’une photo centrée sur ses protèges-tibias. Très clairement, les chaussettes sont les parents-pauvres de la photographie des joueurs de football. C’est donc pour cela qu’il est nécessaire de les remettre au centre du débat. Remettre l’église au milieu du village. Mieux : remettre les chaussettes au milieu du tibia.

Redescendre un peu les chaussettes. C’est faciliter tout un processus de bronzage. Plus besoin de passer des heures dans des cabines pour que le haut des jambes ne bronze. Philippe Mexès, s’il avait passé sa carrière chaussettes baissées, ne se serait jamais blessé dans une cabine de bronzage. Et Mexès ne se serait jamais tapé la honte devant l’intégralité du gratin footballistique mondial. Et puis c’est aussi faciliter la mise en place desdites chaussettes. En effet, lorsque l’on monte les chaussettes, il est beaucoup plus simple de s’arrêter juste au minimum légal que d’arracher méchamment les poils sur de nombreux centimètres.

Avoir du style

Mais surtout, les chaussettes baissées sont l’expression ultime du style d’un joueur. Citer une liste des joueurs jouant chaussettes baissées est suffisamment éloquent. Michel Platini, déjà, dans les années 1980 sous le maillot de la Juventus de Turin, jouait avec les chaussettes au ras des crampons. Un autre français, un peu plus tard, s’est fait remarque en jouant avec les chaussettes baissées : Laurent Blanc. Mais outre l’ancien entraîneur du Paris Saint-Germain et de l’équipe de France, une tripotée de grands joueurs ont également montrés au monde la beauté de leurs tibias.

Paulo Dybala, lui aussi, joue chaussettes baissées
Paulo Dybala, lui aussi, joue chaussettes baissées

Parmi eux, Juan Sebastian Veron, Memphis Depay, Rui Costa ou encore Francesco Totti. Il faut bien ça, certes, pour compenser Jérémy Morel. Mais quand même. Ce sont des grands noms, des grands joueurs, qui ont fait le choix des chaussettes très basses. Qui ont fait le choix du style sur celui du grand public. Et qui ont choisi d’affirmer leur caractère bien trempé, en ne faisant pas comme tout le monde. Ils n’ont pas adopté la mode, et ils ont osés créer leur propre expérience footballistique.

Et c’est aussi ça, le football. Oser créer, oser faire différemment. Proposer aux spectateurs une expérience footballistique toujours nouvelle et toujours différente. Mettre en avant des éléments radicalement opposés à ceux qui existaient avant. Il vaut mieux échouer en tentant l’impossible que se complaire dans la médiocrité des chaussettes relevées.

Rester humble

Néanmoins, joueur chaussette baissées ne doit pas faire perdre au joueur de football son humilité. Car en laissant ses chaussettes plus basses, le créateur sait qu’il prend plus de risques. Bien sûr, pas beaucoup de risques de blessure grave directement du fait de la hauteur de la chaussette. Mais beaucoup de risques annexes, plus difficiles à calculer et à évaluer. Des risques pourtant indissociables du métier de footballeur. Car en jouant chaussettes baissées, et donc en se différenciant de la masse informe des footballeurs, le créateur court le risque d’énerver son vis. « Il se la pète, il ne pense qu’à impressionner la galerie ». Peut-être. Mais le jeu n’en vaut-il pas la chandelle ?

Dans le football, on critique énormément le chambrage. Et les chaussettes baissées peuvent être, par certains, assimilées à du chambrage. Mais c’est aussi ça, l’essence même du football. C’est mettre la pression sur son adversaire, en lui indiquant encore plus la présence du protège-tibias, et donc de l’absence de peur des tacles. Jouer chaussettes baissées, c’est aussi quelque part une certaine forme d’humilité. Le joueur sait qu’il joue tout sur son action. Soit il réussit son geste technique, et dans ce cas il en tire tous les bénéfices. Soit il le rate, et dans ce cas, il en prend tout le malheur.

Enfin, un dernier aspect essentiel n’a pas encore été soulevé. Jouer chaussettes baissées est un énorme avantage en été. Car sous des grosses chaussettes en tricot de football, la transpiration prolifère, et avec elle les bactéries plus ou moins recommandables. Alors en les redescendant un peu, le footballeur laisse un peu plus ses pores respirer, et est donc moins soumis aux infections. En bref, il y a plus d’une raison de se faire plaisir et de descendre ses chaussettes. Et si le footballeur amateur n’est pas encore convaincu, il n’y a qu’une seule méthode pour l’être : essayer. Une fois essayées, les chaussettes baissées ne sont plus jamais délaissées. Sauf si, bien sûr, il fait trop froid !

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