« Nabil Fekir est lancé… il conserve bien le ballon… il rentre dans la surface… oooh l’arbitre qui désigne le point de pénalty ! ». Les réseaux sociaux explosent. #PenaltyPourLyon revient en TopTweet comme très souvent quand l’Olympique Lyonnais est sur le terrain.
Quelques heures plus tard, la presse réagit, les sondages fusent de toute part. « Pénalty ou pas? », les résultats penchant souvent vers la négative, signe d’un ras-le-bol général de cette situation devenue énervante tellement récurrente. Pour l’illustration, voici un petit échantillon du phénomène social et journalistique que je viens de vous décrire.
Vous avez été nombreux à donner votre avis ce matin !
Pour 62% des votants, il n’y avait pas pénalty pour Lyon face à Montpellier. pic.twitter.com/2AJOwdXqn9
— INFOSPORT+ (@infosportplus) 8 février 2018
PÉNALTY POUR LYON
Lyon obtient un penalty un jour après les déclarations de Bruno Génésio, est-ce une coïncidence ? ⚽?️♀️
Réagissez avec #EDS pic.twitter.com/3yexbMgypp
— L’ÉQUIPE du soir (@lequipedusoir) 8 février 2018
14 – Lyon a bénéficié de 14 penalties en L1 2016/17, plus que toute autre équipe des 5 grands championnats. Provocateur.
— OptaJean (@OptaJean) 7 mai 2017
L’OL n’est-il donc pas clairement avantagé par l’arbitrage dans la surface de réparation? Dans les lignes qui suivent, je vais essayer de répondre à cette question. Enquête DV, c’est parti !
I- La méthodologie
Par souci d’objectivité et de transparence, il fallait bien commencer par là. La méthode choisie pour cette enquête est en réalité très simple et directe. Afin de répondre à la problématique mentionnée dans le titre « L’OL mérite-t-il ses pénalties? », j’ai donc choisi d’analyser, une par une, les séquences vidéos des situations ayant débouché sur un pénalty en faveur du club rhodanien. Lorsque la vidéo dans son état original ne permet pas de juger, j’ai utilisé des outils de ralentissement supplémentaire ainsi que des captures d’écran.
Les vidéos inclues sont au nombre de 20. Elles correspondent aux pénalties sifflés en faveur de l’OL durant les deux saisons 2016-2017 et 2017-2018. Les compétitions inclues sont la Ligue 1 et la Coupe de France.
J’ai également choisi de ne pas rentrer dans le jeu des chiffres et des statistiques, sujet déjà abordé ailleurs. Aussi, j’ai décidé de ne pas m’attarder sur les situations litigieuses où les lyonnais n’ont pas obtenu un pénalty qu’ils réclamaient. De même concernant le sujet des sanctions accompagnant les fautes sifflées (carton jaune, carton rouge, carton pour simulation, etc).
J’ai divisé la légitimité des pénalties en 3 niveaux :
- Indiscutable : lorsque la faute ou la main est claire.
- Discutable : lorsqu’il y a une ambiguïté due à une chute exagérée, un contact moyen ou un doute sur une main volontaire ou involontaire.
- Sifflé à tort : lorsqu’il n’y avait ni faute ni main.
Maintenant que le contexte est clair et que la méthode est définie, passons à l’étape suivante.
II- Les données
Comme précisé dans la partie précédente, nos 20 pénalties sont répartis inégalement sur deux saisons:
- 2016-2017 : 14
- 2017-2018 : 6
Les tireurs sont répartis de la manière suivante :
- Alexandre Lacazette : 12 (10 réussis)
- Nabil Fekir : 6 (5 réussis)
- Mariano : 1 (réussi)
- Memphis : 1 (réussi)
Les fautes sifflées sont divisées en :
- Faute de main : 4
- Obstruction/mauvais tacle/accrochage : 16
Le tout est récapitulé dans le tableau ci-dessous.
III- L’analyse
Maintenant que les chiffres et les vidéos sont entre vos mains, il est temps de décortiquer tout cela.
1- OL-SM Caen – Main de Santini
Tolisso reprend de la tête un corner de Fekir, Santini bloque le ballon de la main. Penalty indiscutable.
2- OL-SM Caen – Faute imaginaire de Ben Youssef sur Ferri
Ferri s’infiltre dans la surface, et plonge au contact de Ben Youssef. Penalty imaginaire.
3- OL – Montpellier HSC – Faute de Deplagne sur Fekir
Fekir accélère vers la surface et se fait bousculer par Deplagne à l’entrée de la surface. Fekir avait touché le ballon pour la dernière fois en dehors de la surface. Cependant, Deplagne poe son pied (qui déséquilibre l’attaquant lyonnais) sur la ligne des 16m. Et comme la ligne d’une surface en fait partie, il y avait donc bien pénalty.
4- OL- EA Guingamp – Faute sur Gonalons
En pleine percée en direction du but, Maxime Gonalons se fait bloquer son pied droit par la défense guingampaise à l’intérieur de la surface. Pénalty parfaitement légitime.
5- Toulouse FC-OL – Faute de Diop sur Ghezzal
Lancé dans la surface, Ghezzal réussi un petit pont sur Diop, qui lui accroche légèrement la patte gauche en se plaçant dans sa course. L’ailier lyonnais exagère sa chute, mais le contact est présent. Sans être indiscutable, ce pénalty est loin d’être scandaleux.
6- OL-SC Bastia – Faute de Leca sur Ghezzal
Ghezzal, à nouveau. Au duel face à Leca, il se fait faucher par ce dernier et obtient donc un pénalty tout à fait logique.
7- FC Nantes-OL – Faute de Vizcarrondo sur Diakhaby
Sur un corner lyonnais, Vizcarrondo retient Diakhaby, l’empêchant de reprendre le ballon qui lui semblait destiné. L’arbitre choisit de sanctionner. Choix compréhensible, même si la faute en soi n’est pas flagrante.
8- AS Monaco-OL – Faute de Fabinho sur Lacazette
Après une frappe repoussée par Subasic, Lacazette fonce pour reprendre le ballon, mais se fait violemment tacler par Fabinho. Penalty logique.
9- SM Caen-OL – Main de Da Silva
Au duel avec Lacazette, Da Silva tend maladroitement la main, qui vient toucher un ballon levé par l’attaquant lyonnais. Il a fallu ralentir le ralenti au quart de sa vitesse afin de pouvoir vérifier cette main, qui n’était pas du tout évidente. Bon choix de l’arbitre.
10- OL-Lille OSC – Faute de Soumaoro sur Lacazette
Tacle violent de Soumaoro sur Alexandre Lacazette qui filait au but. Faute indiscutable.
11- OL-AS Nancy Lorraine – Faute de Guidileye sur Memphis
Memphis réussit, dans la surface, sa « spéciale » pour la première fois depuis son arrivée à Lyon. Guidileye tombe dans le piège, et Memphis, accroché, tombe dans la surface, et pénalty logique.
12- OL-Dijon FCO – Faute de Tavares sur Diakhaby
Diakhaby fonce pour tenter de reprendre un ballon aérien. Tavares choisit de tendre le bras pour l’empêcher de poursuivre sa course. La chute spectaculaire du géant lyonnais n’enlève rien à légitimité du pénalty sifflé.
13- Stade Rennais FC-OL – Main de Bensebaini
Darder frappe, Bensebaini détourne le ballon d’un bras bien tendu. Penalty indiscutable.
14- OL-FC Nantes – Faute de Djidji sur Fekir
Fekir déborde Djidji, ce dernier le pousse dans la surface. L’arbitre désigne – à raison – le point de pénalty.
15- OL-RC Strasbourg Alsace – Faute de Martinez sur Traoré
Traoré élimine Martinez d’une sublime feinte de corps. Ce dernier tente de le rattraper, mais le Burkinabé éloigne le ballon d’un double-contact éclair. Le tacle atterrit sur le pied gauche du Burkinabé qui tombe et obtient un pénalty logique.
16- OL-Dijon FCO – Faute de Kwon sur Mendy
Mendy cherche la solution à l’intérieur de la surface. Kwon lui tient son maillot, puis son corps. Le latéral lyonnais tombe et l’arbitre siffle la faute. Rien à dire.
17- ESTAC-OL – Main de Chritophe Hérelle
Memphis part dans le dos de la défense, élimine le gardien ainsi que les défenseurs revenus et frappe au but. Hérelle bloque la frappe sur la ligne de son gardien. Penalty indiscutable.
18- OL-Lille OSC – Faute de Touré sur Cornet
Cornet est lancé, à l’entrée de la surface. Touré fait un petit bond et place son genou dans la cuisse de l’attaquant lyonnais. La scène est clairement visible à 2:16, dans la vidéo correspondante (cf le tableau). Le pénalty est là aussi légitime.
19- Toulouse FC-OL – Faute de Lafont sur Mariano
Mariano se présente seul face au portier toulousain. Il profite d’un contact extrêmement léger au niveau du genou pour s’écrouler dans la surface et obtenir le pénalty. Celui-ci n’avait clairement pas lieu d’être.
20- Montpellier HSC -OL – Faute de Mendes sur Fekir
Fekir profite d’une mauvaise passe en retrait du MHSC, fonce sur le ballon, dans une situation qui rappelle curieusement celle décrite au point #3 (contre Montpellier également). Il devance Mendes sur le ballon. Ce dernier met trop d’impact. Suffisamment pour déclencher à raison le sifflet de l’arbitre.
IV- Discussion
Après avoir recensé toutes les situations de fautes dans la surface en faveur de l’Olympique Lyonnais, c’est l’heure du verdict en chiffres.
Sur les 20 pénalties étudiés, nous avons :
- 15 pénalties indiscutables (1, 3, 4, 6, 8, 9, 10, 11, 13, 14, 15, 16, 17, 18 et 20)
- 3 pénalties discutables (5, 7 et 12)
- 2 pénalties sifflés à tort (2 et 19)
En triant les pénalties selon le joueur qui les a provoqués (mains exclues), nous obtenons le classement suivant :
- Nabil Fékir : 3
- Alexandre Lacazette, Rachid Ghezzal, Mouctar Diakhaby : 2
- Maxwel Cornet, Maxime Gonalons, Bertrand Traoré, Memphis, Mariano, Jordan Ferri, Ferland Mendy : 1
En regardant de plus près, plusieurs chiffres et noms m’interpellent :
- Sur les 16 pénalties sifflés suite à une faute (mains exclues), 10 ont été provoqués par des joueurs assez techniques (Lacazette, Fekir, Ghezzal, Memphis, Traoré, Mendy)
- Six pénalties ont été provoqués par des joueurs moins techniques (Cornet : vitesse, Diakhaby : duels aériens, etc)
- Parmi ces six pénalties, figurent les deux simulations (de Mariano et Ferri)
- Parmi les trois pénalties discutables, le nom du défenseur lyonnais Mouctar Diakhaby revient à deux reprises. En effet, sa vivacité sur les ballons aériens, ainsi que son centre de gravité très haut et sa puissance physique pas encore au point, le rendent extrêmement vulnérable aux pertes d’équilibre pouvant résulter en de violentes chutes. Chutes réelles ou exagérées ? Un véritable calvaire pour les défenseurs, mais aussi pour les arbitres qui n’ont souvent d’autre choix que de siffler en sa faveur.
V- Conclusion
Après avoir :
- Recensé l’intégralité des pénalties obtenus par l’OL ces deux dernières saisons
- Analysé en détails toutes les séquences vidéos recensés
- Interprété les résultats obtenus
Je peux conclure en disant que :
- La pression médiatique mise aux arbitres par rapport aux pénalties sifflés en faveur de l’OL (cf. l’introduction) ;
- L’image-clichée de « plongeur » collée aux joueurs lyonnais sur les réseaux sociaux ;
- Les polémiques qui ne cessent d’éclater à chaque pénalty accordé à Lyon…
… sont très éloignées de la réalité du terrain.
– En effet, peu d’équipes peuvent se vanter de regrouper autant de fins dribbleurs attirés par la surface, que ceux que possèdent l’OL.
– Avec une tactique qui repose énormément sur le dribble et l’exploit individuel, surtout depuis la prise en main de l’équipe par Bruno Genesio en janvier 2016, il n’y a rien de plus normal que d’obtenir un grand nombre de fautes, à l’intérieur comme à l’extérieur de la surface de réparation.
– Avec seulement 2 pénalties sur 20 sifflés à tort en deux saisons, il est évident que l’acharnement des médias et des réseaux sociaux ne se base pas sur des faits avérés, mais sur un pur effet de foule.
Ma conclusion scientifique finale sur le sujet, vous la tenez désormais entre vos mains. Mais le cœur n’a pas encore dit son mot. Et son mot, ce n’est autre qu’une réflexion pleine d’amertume à peine dissimulée.
Alors certes, le manque d’objectivité d’un supporter adverse peut faire mal. Mais je peux facilement le mettre sur le compte de la passion. Comme je défends mon équipe, les autres ont le droit de défendre leurs clubs de cœur. Mais le problème n’est pas exactement là, mais plutôt du côté des antennes d’influence : les médias.
Alors que le rôle premier des médias est d’informer, beaucoup ont choisi, malheureusement, de prendre un autre chemin. Le chemin du gain, du clic et du buzz. Le chemin qui appelle à caresser la majorité dans le sens du poil, en témoigne le « sondage » cité au début de l’article. L’obsession du succès économique, peu importe la route suivie. Même s’il faut pour cela sacrifier la vérité, piétiner la passion des autres, et renier tout ce que l’on aime dans le foot.
Et pour vous, #PenaltyPourLyon ou pas ? N’hésitez pas à laisser vos commentaires sur le sujet, en créant un compte Disqus si vous n’en avez pas déjà.
Malgré les grands efforts investis dans cet article, il se peut que certaines erreurs aient échappé à ma vigilance. Je m'en excuse évidemment. Les créations graphiques contenues dans cet article (tableaux, bannières,etc) sont la propriété de Demivolée.com . Il n'est donc pas autorisé de les recopier sans indiquer la source.