L’Allemagne. Quatre victoires en Coupe du Monde, et une histoire compliquée. Car deux des quatre victoires ont été obtenues alors que l’Allemagne n’était qu’Allemagne de l’Ouest. Mais de l’autre côté, à l’est, il y avait aussi des grands joueurs. Parmi eux, Joachim Streich. Voici son histoire.

Né en 51

Quand Joachim Streich voit le jour, le 13 avril 1951, l’Allemagne est déjà coupée en deux depuis deux ans. C’est un peu par hasard qu’il se retrouve du côté est, car sa ville natale de Wismar est située à quelques dizaines de kilomètres seulement de la limite entre la zone soviétique et la zone britannique. Toujours est-il que c’est dans ce contexte que Joachim Streich grandit. Dans un pays qui porte une très grande attention à l’éducation physique, Joachim pratique de nombreux sports dès son plus jeune âge. Mais malgré des performances plus qu’honnêtes en athlétisme, le sport que Joachim apprécie vraiment, c’est le football. Alors qu’il n’a que sept ans, il prend sa première licence à l’Aufbau de Wismar. Il grandit tranquillement, et devient le joueur majeur de son équipe.

Positionné à la pointe de l’attaque de son club – qui est devenu le TSG Wismar en 1963 -, il enfile les buts comme des perles. Ses performances de haut vol lui permettent de rejoindre en 1967 le grand club de la région, le FC Hansa Rostock, alors qu’il n’a que seize ans. Joachim Streich passe deux ans dans les équipes de jeunes du Hansa, où il est très largement le meilleur buteur. Avec ses coéquipiers, il est sacré champion de Juniorenoberliga en 1968, et est même appelé en sélection nationale est-allemande de jeunes. Il débute avec la sélection jeune contre Cuba le 9 août 1968, et inscrit ce soir-là le deuxième but de la victoire 2-0. L’apogée de sa carrière jeune arrive en 1969, quand Streich et la RDA arrivent deuxième de l’Euro U19 disputé à domicile. Ils sont malheureusement défaits cruellement au tirage au sort en finale contre la Bulgarie.

Les grands débuts de Joachim Streich

Les grands débuts de Joachim Streich ne vont logiquement pas tarder. Streich a déjà débuté à l’âge de dix-sept ans, le 23 février 1969, contre l’Energie Cottbus, dans l’équipe réserve du FC Hansa Rostock. Mais il va falloir attendre le début de saison 1969-1970 pour le voir aligné dans l’équipe première du FC Hansa Rostock. Très vite, il devient absolument essentiel dans le dispositif offensif du Hansa. Le 8 décembre, il fait ses débuts en équipe nationale est-allemande. Même si le match n’est qu’un nul ennuyeux contre l’Irak 1-1, cela signifie beaucoup pour Streich. Étonnamment, Joachim Streich devra patienter jusqu’en 1971 avant de connaître sa seconde sélection avec la RDA. Pendant ce temps, en club, il trouve tout doucement le chemin des filets. Avec huit réalisations pour sa première saison, il termine meilleur buteur de son équipe.

Les deux années suivantes confirmeront son statut. Il continue de marquer, et est très apprécié des supporters. Mais même dans un pays un peu particulier comme la RDA, les joueurs ont des ambitions. Et celles de Joachim Streich le conduisent loin du FC Hansa Rostock. Alors au début de l’été 1975, Joachim Streich fait ses adieux aux supporters. Avec cent-quarante-et-un matchs au compteur et cinquante-huit buts, il a besoin de passer un pallier.

La fédération de football est-allemande ne lui laisse cependant pas beaucoup d’opportunités. Il est bien évidemment interdit de changer de championnat. Il n’a que deux solutions : soit rester au FC Hansa Rostock – ce qu’il ne veut pas -, soit partir au 1. FC Magdeburg. C’est cette seconde option que Joachim Streich, du haut de ses vingt-quatre ans et de ses dix-huit sélections va choisir. Il rejoint au mois de juin les rangs de Magdeburg, pas forcément ravi de ne pas avoir eu le choix.

Tout s’accélère

La carrière de Joachim Streich va s’accélérer très vite. A Magdeburg, il s’épanouit à la pointe de l’attaque et dans sa vie personnelle. Il trouve un emploi à sa femme, et parvient à dégoter un joli logement. Sa première saison, avec treize buts, est relativement honorable mais n’est qu’un présage. Entre 1977 et 1983, Joachim Streich remportera quatre fois le titre de meilleur buteur de première division est-allemande. En point d’orgue, son sextuplé lors d’une victoire 10-2 en championnat contre le BSG Chemie Böhlen. Son palmarès va aussi s’étoffer, avec trois coupes d’Allemagne de l’Est à titre collectif. A titre individuel, il est élu meilleur joueur d’Allemagne de l’Est à deux reprises, en 1979 et en 1983. Rarement blessé et parfois capitaine, il est absolument essentiel pour Magdebourg. Ses adieux à l’été 1985 sont déchirants.

Mais avec cent-soixante-et-onze buts en deux-cent-trente-sept matchs, il mérite bien sa retraite. Il quitte également la sélection, sur un bilan officiel et cinquante-cinq buts en quatre-vingt-dix-huit sélections (*), faisant de lui le meilleur buteur de l’histoire de l’Allemagne de l’Est… et le troisième de l’Allemagne réunifiée derrière Gerd Müller et Miroslav Klose. Celui que l’on surnommait le « Gerd Müller de l’Est » est encore aujourd’hui le meilleur buteur de l’histoire de Magdebourg. Et même si sa carrière ne présente pas de grands reliefs, il demeure pendant une douzaine d’années sur des bancs professionnels allemands. Joachim Streich prend définitivement sa retraite sportive en 1992, pour devenir journaliste chez Kicker. Et demeure pour beaucoup d’anciens est-allemands nostalgiques l’un des plus grands joueurs de l’histoire du football.

(*) Jusqu’en 1999, Joachim Streich comptait cent-deux sélections et cinquante-sept buts. Cependant, quatre sélections et deux buts lui ont été retirés par la FIFA cette année-là parce qu’ils provenaient des Jeux Olympiques de 1972.
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