L’apprentissage du football a toujours été une étape essentielle dans la vie des jeunes. Et c’est ce que le journal Football Association s’évertuait à relater. Aujourd’hui, dans ce dixième épisode d’Archives, la série qui explore le passé médiatique du football, nous irons voir un article du 15 mai 1920, signé Gabriel Hanot, s’intitulant « Comment apprendre à jouer au Football ».

Comment apprendre à jouer au Football

Les éléments du football

Pendant cette période de préparation morale et d’incubation, l’enfant acquerra à la fois un viril amour du sport, une parfaite connaissance du jeu et un esprit de corps sans défaillance. Il n’aura plus alors qu’à mettre en pratique ce qu’il a vu, senti et compris.

Mais il faudra bien se garder de lâcher les débutants sur un terrain de football comme on lâche des poulains dans une prairie. De même qu’au régiment, les recrues décomposent les mouvements du maniement d’armes, de même le débutant doit apprendre à exécuter séparément un shot, une passe, un dribbling, un coup de tête. C’est de cette manière seulement qu’il obtiendra la maîtrise, non pas encore du jeu, mais du ballon : combien d’excellents équipiers d’aujourd’hui se montrent incomplets, parce qu’ils ne possèdent pas cette maîtrise de la balle ! L’un ignore le jeu de tête, un autre est incapable de bloquer une balle ; un troisième ignore si son shot ira en l’air ou à ras de terre ; un quatrième, au lieu d’être ambidextre, est exclusivement droitier ou gaucher. C’est que tous ces joueurs ont voulu mettre la charrue devant les bœufs et participer à une partie de football avant de connaître parfaitement les éléments de ce sport ; c’est qu’on les a laissés passer d’équipes en équipes sans contrôler leur savoir-faire, sans les obliger à combler leurs lacunes et à se débarrasser de leurs défauts.

Le rôle d’un entraîneur ou d’un professeur de football serait très important pour cette période de l’apprentissage : car le professeur, en football comme en gymnastique, aura à montrer le mouvement, à l’expliquer avec force détails et comparaisons : l’enfant aura toutes facilités pour le répéter, et pour demander conseil en cas d’insuccès. Il évitera ainsi la fatigue et l’ennui qui font vite leur apparition quand le débutant, livré à lui-même, cherche en vain à imiter un arrêt ou un shot qu’il a admirés pendant le match du dimanche précédent.

Les premiers matchs

Comme il faut à tout prix éviter l’écueil de l’ennui, l’enseignement ne se cristallisera pas dans ces leçons et démonstrations qui appartiennent plus encore au domaine théorique qu’à la pratique même du jeu. Les séances d’apprentissage et d’entraînement détaillé qui, en cas de mauvais temps, pourraient avoir lieu dans une salle couverte de gymnase ou de manège, se termineront par un match au grand air. L’instructeur devra tenir compte de l’âge des enfants pour la durée de la partie et les dimensions du terrain. Si le ballon utilisé peut être de poids et en volume semblable à celui des clubs, le temps du match sera limité, et les limites du champ de jeu seront réduites. Deux mi-temps de 25 minutes et un terrain de 80 mètres de longueur sur 40 mètres de largeur seront entièrement suffisants pour les évolutions et les ébats des débutants. Ces matches pourront donc avoir lieu sur des terrains réguliers, en plaçant les buts dans le sens de la largeur. Les enfants s’en donneront à cœur-joie, sans que le professeur intervienne à chaque instant pour faire la critique, sauf dans les cas de mauvais esprit sportif. A ce point de vue, le maître et conseiller devra être intraitable : toute infraction à l’honnêteté sportive, et tout acte déloyal devront être réprimés impitoyablement. La droiture, la franchise, la dignité personnelle sont des qualités facile à acquérir sur un terrain de football, et à transposer ensuite dans le domaine de la vie sociale.

Quant aux fautes mêmes du jeu, elles ne seront critiquées qu’après le match, après la douche et le vestiaire. Le désir de faire mieux incitera les enfants à tenir compte des observations ; pourtant, s’ils ne semblent pas disposés à perfectionner leurs qualités d’adresse et de compréhension, il sera bon de les priver du match suivant, comme on prive de récompense ceux qui n’ont pas bien travaillé, ou de dessert ceux qui n’ont pas été sages.

Gabriel Hanot.
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« Quand un vrai génie apparaît en ce bas monde, on le peut reconnaître à ce signe que les imbéciles sont tous ligués contre lui ». (Jonathan Swift, 1667-1745)