Pourquoi comparer dans cette analyse l’AS Saint-Étienne et l’Olympique Lyonnais ? Tout d’abord parce qu’il s’agit bien d’enrichir la rivalité entre les deux clubs. Et ce en jetant de l’huile sur le feu avec un titre aguicheur. Mais il s’agit aussi de démonter une idée que les lyonnais se sont depuis bien longtemps ancrés dans l’esprit : « nos jeunes sont les meilleurs, regardez-les dans les plus grands clubs ». L’enjeu est aussi et surtout de comparer deux clubs constamment en confrontation dès les équipes de jeune, et ainsi de mettre en évidence une domination statistique de l’ASSE. Enfin nous relativiserons le propos, en mettant en avant une supériorité lyonnaise évidente. Tout cela en pointant du doigt les difficultés stéphanoises dans la continuité entre les équipes de jeune et l’équipe première. 

L’ASSE : l’idole des jeunes

Cela va peut-être vous surprendre si vous ne le savez pas, mais l’ASSE a en général des meilleurs résultats que l’Olympique Lyonnais en équipe de jeunes. Pour juger de cela, on va considérer les résultats des équipes U17 et U19, caractéristiques de ce qu’on appelle les « équipes de jeunes ».

Cette saison, en U17 national, l’ASSE possède 4 points d’avance, et +26 de différence de buts par rapport à Lyon. Et cela avec un match de moins ! L’équipe lyonnaise est donc deuxième et donc possiblement à 7 points du club forézien, leader. De même sur la saison 2015-2016 et 2016-2017 l’ASSE avait-elle fini en tête du classement, devant le club du Rhône. Parmi le collectif très performant de l’ASSE, on retrouve une individualité qui se détache, Bilal Benkhedim, déjà 16 fois buteur en 14 matchs.

Au niveau de la catégorie des U19 nationaux, il est cette année plus difficile de comparer les deux protagonistes, car ils ne font pas partie de la même poule. En 2015-2016, l’ASSE avait été champion de sa poule tandis que Lyon avait lui aussi été champion. Pas de différence donc ici. Sur la saison 2016-2017, les deux clubs ont fini à 10 places d’écart, au sein de la poule D.

Alors, même si parfois les deux clubs se neutralisent, l’avantage est, en tout cas récemment, à l’ASSE. Les derbys confirment cette perception. Durant la saison 2016-2017, l’ASSE l’emporte 2 à 0 en U19 national chez son voisin – même si elle avait été battue 1 à 0 aller. De même l’ASSE l’a emporté 1 but à 0 en U17 national, et cela grâce au même Bilal Benkhedim.

L’ASSE a donc le meilleur centre de formation. Ou pas.

L’OL : allumez le feu

En observant l’équipe actuelle de l’ASSE, on peut sincèrement remettre en doute une formation performante. Ronaël Pierre-Gabriel, Loïc Perrin, Habib Maïga, Jonathan Bamba : voilà la très courte liste des joueurs issus de la formation stéphanoise qui ont une place importante dans l’équipe.

Comment peut-on avoir un tel vide ? Surtout après une génération beaucoup plus prometteuse avec Guilavogui, Zouma, Ghoulam ou même Saint-Maximin. Sans être la génération la plus brillante de son histoire, elle a tout de même permis de porter le club jusqu’à une Coupe de la Ligue remportée en 2013 et de retrouver par la suite ces joueurs dans les plus grands clubs européens. On retrouve Zouma à Chelsea, Ghoulam à Naples pour  et Guilavogui à l’Atlético de Madrid – malgré un passage plus que compliqué.

Au contraire, comment ne pas louer la formation lyonnaise! En observant les joueurs actuels présents dans l’effectif et les joueurs ayant quitter le club plus ou moins récemment pour s’imposer dans les plus grands clubs européens on remarque une puissance lyonnaise. L’équipe lyonnaise, constituée de jeunes joueurs comme Houssem Aouar, Nabil Fékir ou Myziane Maolida, est pleine de promesses. Comment oublier Karim Benzema, qui s’est imposé depuis huit ans comme le numéro 9 incontournable du plus grand club au monde ? Corentin Tolisso, Alexandre Lacazette, Samuel Umtiti ou Anthony Martial complètent la liste.

Mais alors comment des équipes jeunes ayant des résultats similaires peuvent-elles connaître des écarts si importants par la suite en équipe première ?

L’ASSE domine en équipes de jeunes. Mais pourtant c’est l’OL qui fait émerger des pépites issues de leur centre de formation au sein de leur équipe première. Comment expliquer ce phénomène ? Ce sont deux philosophies qui s’opposent entre l’ASSE et l’OL.

L’OL a assis depuis longtemps sa politique sportive sur une place importante donnée aux jeunes. Ils n’hésitent pas à les plonger très tôt dans le bain de la Ligue 1. Et c’est bien cette entreprise qui mène leurs joueurs à gagner en confiance, en expérience et en technique en jouant aux côtés de grands joueurs. Ainsi, de nombreux joueurs issus de la formation lyonnaise sont devenus de grands joueurs. Mais beaucoup d’autres aussi n’ont jamais confirmé, et cela par le fait que le club fait jouer beaucoup de jeunes joueurs. Rachid Ghezzal a beaucoup joué sous le maillot lyonnais sans être une pépite. Jordan Ferri semble condamné au mieux à un rôle de remplaçant. Et Grenier, pourtant dans la liste de Deschamps pour le mondial 2014, semble être au placard.

Du côté stéphanois, l’idéologie est bien différente. Très peu de jeunes joueurs sont lancés, comme en témoignent les récentes équipes qui ne comportent que peu de joueurs formés au club. Est-ce une uniquement une politique qui voudrait ne lancer que des joueurs déjà confirmés en équipe de jeunes ? Ou le problème est-il plus profond ?

Des problèmes institutionnels plus que relatifs à la qualité des joueurs

Premièrement, et depuis longtemps déjà, un point est montré du doigt. On remet en cause le fait que les joueurs formés à l’ASSE sont très bien adaptés au jeu des équipes de jeunes. Mais pas à l’équipe première. Des grands, costauds, pas forcément techniques. Quand ces dispositions sont suffisantes étant jeunes, la qualité technique exigée par la Ligue 1 les rappelle à leur faible niveau, qui ne leur permet pas, ainsi, de devenir des éléments incontournables de leur équipe. Sur ce point, au contraire, l’OL a très bien défini ses objectifs. Ils privilégient souvent des joueurs techniques, quitte à être moins performant dans les championnats de jeunes. Ainsi, l’OL se dote de joueurs aptes à être titulaires en Ligue 1, plus que Saint-Étienne.

Deuxième point. Lyon domine par son centre de formation de manière incontestable, notamment grâce à une politique qu’on pourrait dire de « post-formation ». En effet, l’OL n’hésite pas à acheter de nombreux joueurs en devenir, entre 17 et 20 ans. Ces pépites sont ensuite essayés en CFA puis en équipe première. On peut reprendre les cas récents de Jean-Philippe Mateta. Venu de Châteauroux, il marque but sur but avec Le Havre en Domino’s Ligue 2. Lucas Tousart, acheté à Valenciennes est un élément essentiel de l’entre-jeu lyonnais. Maxwel Cornet, est critiqué mais est performant. Lyon s’appuie ainsi sur des joueurs qu’il n’a pas formé mais qu’il achète pour peu cher. Ce sont les mêmes qui deviennent par la suite des joueurs déterminants de l’équipe. Ainsi, Lyon, forme des joueurs en recrutant, et s’appuie donc sur une forte cellule de recrutement.

Au contraire l’ASSE n’adopte qu’en quantité minime cette politique. L’ASSE a depuis longtemps favorisé l’achat de joueurs expérimentés. Souvent de Ligue 1. Récemment, on peut citer l’arrivée de Assane Diousse. Peut-être signe de la volonté d’instaurer aussi une « post-formation »…

 

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