L’ancien gardien de but et directeur sportif du FC Séville, Monchi, s’est exprimé lundi dernier devant les micros du journal économique espagnol Cinco Días – El País. Grâce à Rocé Léon, nous pouvons vous proposer en exclusivité l’interview traduite de l’un des plus grands directeurs sportifs du football moderne.

Peut-on vous considérer comme un grand directeur des ressources humaines ?

Personnellement j’ai toujours aimé la discrétion, mais je suis un gestionnaire de talent. Ce n’est pas facile, mais ce n’est pas non plus difficile. Nous choisissons les footballeurs, nous les suivons, nous avons une image idolâtrée d’eux mais nous oublions que ce sont des personnes. L’important est de se concentrer sur la personne et non sur le footballeur, parce que quand la personne ne se sent pas épanouie, le footballeur ne l’est pas.

Ce qui est important, et ce qui est ma priorité depuis longtemps est que les personnes soient satisfaites de ce qu’elles font. La gestion des ressources humaines est complexe, et vous devez trouver le meilleur scénario pour en améliorer le fonctionnement. Parfois on oublie que des joueurs comme Messi ou Ronaldo sont des êtres humains, qu’ils ont des amis, de la famille, qui ont des problèmes. Parfois tu le vois clairement, parfois non, il faut trouver l’équilibre.

Comment doit-on gérer les égos au sein d’une organisation ?

C’est une composante supplémentaire. Il faut comprendre l’égo, et faire comprendre à la personne ou au joueur, que la personne qui se tient devant lui est son égal. Le groupe doit prévaloir sur l’individu, bien qu’il soit difficile de minimiser son importance. Un directeur sportif doit toujours être proche des joueurs et doit savoir gérer les égos. Par exemple, Luis Fabiano et Kanouté (deux de ses découvertes) avaient un gros égo, et les deux joueurs étaient importants. Quand l’un d’entre eux marquait un but, je devais prendre soin de l’autre. Parce que lorsqu’un footballeur va bien, il n’a pas besoin d’aide, il faut être encore plus proche des joueurs lorsqu’ils ne vont pas bien.

Votre patience est-elle infinie ?

La structure que je suis est l’antithèse de la logique. La hiérarchie établi un directeur des ressources humaines au sommet de l’entreprise. Pour commencer, le directeur des ressources humaines est toujours au-dessus du salarié, ici c’est l’inverse, ils gagnent plus d’argent que moi. Et je dépends d’eux. Il faut avoir beaucoup de patience et d’intelligence, il faut souvent savoir compter jusqu’à 10 (expression pour dire prendre du recul, ndt) et être toujours dans l’analyse.

C’est ainsi que se gagne le respect du vestiaire ?

Le respect se gagne en étant proche du joueur, toujours proche. Le footballeur, quand il est entouré, il voit qui est intéressé par le joueur et qui est intéressé par la personne qu’est le joueur. Il voit et prend en compte lorsqu’il enlève le costume de footballeur, que tu seras là pour lui. Il s’agit de savoir ce dont a besoin le joueur et lui donner quand il le nécessite.

Vous avez également généré des revenus pour le club avec ce modèle de transfert ?

C’est une stratégie d’affaire, une génération de plus-value importantes. Parce qu’avec les revenus du club, nous ne pouvions pas maintenir la structure, ni faire de transferts. Ce que nous avons fait, trouver des joueurs, augmenter leur valeur et générer des plus values grâce aux transferts. Nous vendons pour pouvoir maintenir les salaires du club. Nous ajoutons au sigle de Société Anonyme le D de Deportiva (le S de Sport/Sportif, ndt), nous sommes une SAD, parce que les résultats financiers doivent être ajoutés résultats sportifs.

Quel conseil donneriez-vous en tant que chef d’organisation ?

C’est difficile de donner des conseils, faire des recommandations. Je ne sais pas si je suis un bon ou mauvais chef. Certains disent que je suis bon, et je ne sais pas si cela est bon ou mauvais. Je suis réellement proche des employés, des techniciens  et cela je ne l’ai appris via aucun master, je l’ai appliqué par pure logique.

Je dis toujours que les mauvaises décisions, c’est moi qui les prends, et les bonnes, c’est l’équipe. En fait, je crois que je suis exigeant grâce à ma croyance en l’initiative de laisser chacun être soi-même et le répercuter dans ses actions. J’apprécie les choses ainsi. Je me sens très fier de ce que nous avons réalisé à Séville, que de l’obscurité soit apparu un club qui génère des choses.

En fait, votre départ provoque un gros choc. Même votre fils a écrit une lettre émouvante.

C’est une décision qui s’explique par deux choses, j’ai passé 29 années ici, 17 années comme directeur sportif. (Monchi a évolué au club de 1988 à 1999 en tant que joueur, ndlr). Je suis très « Sevillista », mais j’avais besoin de reprendre mon souffle. Et de faire des choses différentes.  Maintenant, j’ai des offres, parce que quand vous travaillez dans un club comme Séville, cela vous valorise. Il est clair que cela ne sera pas en Espagne. L’offre de la Roma tient la corde, mais ce n’est pas la seule. Je ne déciderai pas dans l’urgence. Il ne faut jamais se laisser emporter par l’argent, mais par le projet. Je vais aller là où je peux agir comme Monchi.

Traduction de l'interview de Monchi par Rocé Léon. Tous propos sont extraits et traduits de Cinco Días - El País. Source : http://cincodias.elpais.com/cincodias/2017/04/14/companias/1492163924_349640.html
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